Les théories de l’apprentissage

Elaboré par l’inspecteur : Mohamed Okbi AMRI
Les théories de l’apprentissage
I/ Introduction
II/ Modèle transmissif
III/ Behaviorisme
IV/ Constructivisme
V/ Socioconstructivisme
I/ Introduction:
  • Les théories psychologiques fournissent des résultats et des concepts qui contribuent au renouvellement des méthodes d’enseignement et des pratiques d’apprentissage.
  • La psychologie est une discipline ressource qui fournit des outils, concepts et modèles susceptibles d’aider l’enseignant à mieux gérer sa pratique professionnelle.
Enseigner et apprendre en première approche:
  • Apprendre: c’est acquérir, s’approprier des connaissances, construire de nouvelles compétences, modifier sa façon d’agir, de penser, etc.
  • Trois définitions de M.Develay:
    • apprendre c’est « trouver du sens dans une situation d’apprentissage ».
    • apprendre c’est maîtriser une habileté. Au terme de l’apprentissage, l’apprenant est capable d’une performance nouvelle dont il n’était pas capable au début de l’apprentissage.
    • apprendre c’est créer des ponts cognitifs entre des éléments de savoir isolés.
  • Enseigner véhicule au moins 3 significations différentes selon le rapport privilégié:
    • si on privilégie le rapport au savoir, enseigner revient à transmettre des connaissances en les exposant le plus clairement , le plus précisément possible. C’est la caractéristique du modèle dominant en vigueur dans l’institution scolaire: le modèle transmissif d’enseignement.
    • si on privilégie l’acquisition d’automatismes, enseigner revient à inculquer des comportements, des attitudes, des réactions, des gestes professionnels. Enseigner c’est entrainer les élèves à produire les réponses attendues selon les problèmes rencontrés. Inculquer des comportements, acquérir des automatismes, nous place dans la perspective théorique du behaviorisme.
    • si on privilégie le rapport aux élèves, enseigner revient à faire apprendre, faire étudier, guider, accompagner les élèves dans les mises en activité que l’on propose. Ce choix consiste à privilégier les processus d’acquisition et de construction des connaissances par les élèves. Cette perspective a une double référence théorique complémentaire: le constructivisme et le socioconstructivisme.
    D’après ce qui précède, on peut faire le schéma suivant:
II/ Modèle d’enseignement direct, ou modèle transmissif
  • Conception de la tête vide: elle s’appuie sur l’hypothèse que l’apprenant, au début de l’apprentissage d’une nouvelle notion, a la tête vide : il ne sait rien par rapport à cette connaissance.
  • Le rôle de l’élève : être attentif, écouter, noter.
  • Le rôle de l’enseignant : présenter clairement le savoir puis proposer des exercices d’entrainement.
  • Il existe des variantes de cette approche transmissive. En voici 2 exemples:
    • l’exposé de l’enseignant est entrecoupé de questions afin de s’assurer de la bonne compréhension du message par les élèves.
    • l’enseignant pose des questions pour faire trouver ou dire par les élèves des éléments de la connaissance nouvelle (cours dialogué ou classe vivante)
  • l’enseignant pose des questions pour faire trouver ou dire par les élèves des éléments de la connaissance nouvelle (cours dialogué ou classe vivante)
  • C’est davantage un modèle d’enseignement que d’enseignement-apprentissage.
  • L’enseignant, celui qui sait, est en position centrale d’émetteur, de transmetteur de connaissances.
  • Les élèves, ceux qui ne savent pas, sont en position de récepteurs.
  • Pour être efficace, ce modèle requiert des élèves:
    • attentifs, qui écoutent;
    • relativement motivés;
    • déjà familiarisés avec ce modèle de fonctionnement scolaire;
    • qui ont les pré-requis nécessaires pour capter le discours de l’enseignant;
    • qui ont un mode de fonctionnement assez proche de celui de l’enseignant, pour que le message puisse passer par émission-réception;
    • qui ont une autonomie d’apprentissage suffisante pour faire par eux-mêmes un travail d’appropriation;
    • qui travaillent régulièrement.
  • Avantages de l’enseignement fondé sur cette conception: elle permet à court terme de gagner du temps. Cet enseignement sera très efficace pour faciliter la structuration de connaissances correctes, mais disparates et lacunaires.
  • Critiques de ce modèle:
    • les problèmes de communication limitent ce type d’enseignement;
    • tous les élèves reçoivent le même contenu au même rythme;
    • L’enseignant impose le rythme d’apprentissage;
    • il permet d’avancer plus vite dans le travail scolaire par rapport au programme, mais parfois au détriment de ce que les élèves peuvent comprendre et assimiler;
    • il induit une forme de passivité chez les élèves;
    • Il limite l’engagement de l’élève dans l’apprentissage;
    • il ne développe pas l’esprit critique chez l’élève;
    • les interactions entre les élèves sont inexistantes…
III/ Le behaviorisme
(Watson, Skinner, Pavlov)
  • Le behaviorisme, terme créé en 1913 par l’américain Watson à partir du mot behavior qui signifie comportement.
  • Hypothèse de base: on ne peut pas avoir accès aux structures mentales de l’individu, mais on peut étudier les comportements observables et les modifier à la suite de certains stimuli et d’un renforcement des réponses positives.
  • Les behavioristes s’intéressent aux « entrées » et aux « sorties » plus que les processus eux-mêmes.
  • Ce qui est attendu au niveau des élèves ce sont des comportements du genre: l’élève devra être capable de … + un verbe d’action. Un verbe d’action (distinguer, nommer, reconnaitre, classer…) et non un verbe mentaliste (comprendre, savoir, réfléchir…).
  • Le rôle de l’enseignant:
    • définir des objectifs précis tels que « à la fin de la séquence l’élève sera capable de … » (comportement observable). Cet objectif peut être décomposé en sous-objectifs.
    • mettre en place des situations où l’apprenant découvrira le nouveau comportement et atteindre les sous-objectifs. La récompense = approbation de l’enseignant.
    • proposer des situations d’entrainement pour automatiser le comportement nouveau. On peut faire les schémas suivants:
  • Limites de l’enseignement fondé sur cette conception:
    • Difficultés pour les élèves de donner du sens aux connaissances enseignées, mauvaise compréhension des tâches effectuées. Ils franchissent les étapes mais n’ont pas de vision globale de leur travail.
    • Mauvaise aisance des élèves pour transférer les nouvelles connaissances acquises. Le guidage empêche l’élève de rencontrer les obstacles.
    • Problème de l’intégration des différents micro-objectifs: l’élève atteint les sous-objectifs mais pas forcément l’objectif général. En matière d’apprentissage, le tout ne peut pas être la somme des parties qui le composent.
    • À force de vouloir réduire les difficultés inhérentes à un apprentissage, on peut finir par les contourner et amener les élèves à réaliser des tâches au cours desquelles ils n’apprennent plus suffisamment.
  • Avantages :
    • L’enseignement est centré sur l’apprenant dont il cherche à favoriser l’action;
    • Élève en situation de réussite;
    • Ce modèle est efficace dans les apprentissages techniques ou professionnels. En particulier dans les formations courtes à caractère technique, quand ce qui compte est bien la modification d’un comportement, l’obtention d’un nouvel automatisme, la connaissance d’une algorithme d’actions.
IV/ Le constructivisme
(J.Piaget)
  • Jean PIAGET (1896-1980): psychologue suisse, épistémologue et généticien, il occupe une place prépondérante dans la psychologie contemporaine. Ses travaux ont porté sur la formation de l’intelligence chez l’enfant, la construction des connaissances et les opérations intellectuelles.
  • Cette théorie développe l’idée que les connaissances se construisent par ceux qui apprennent.
  • Les constructions mentales sont le produit de l’activité de l’élève.
  • L’apprentissage résulte de l’interaction de l’apprenant avec son milieu.
  • L’enfant organise son monde au fur et à mesure qu’il apprend, en s’adaptant.
  • Assimilation: il y a assimilation lorsqu’un individu (qui interagit avec son milieu de vie ou qui est confronté à un problème dans une situation d’apprentissage) intègre des données qui viennent du milieu ou de la situation problème, sans modifier ces données. Il intègre ces données en les reliant aux connaissances dont il dispose déjà.
  • Dans une perspective d’assimilation, comprendre un problème revient à le faire entrer dans les cadres de compréhension et de connaissances que l’individu maîtrise actuellement.
  • On peut faire le schéma suivant:
    Assimilation: individu ----------> milieu
  • Accommodation: le processus d’accommodation est marqué par l’adaptation du sujet à des situations nouvelles d’où modification de ses cadres mentaux. C’est donc une action de l’environnement sur l’individu qui va avoir pour effet de provoquer des ajustements dans la manière de voir, de faire, de penser du sujet, en vue de prendre en compte ces données nouvelles.
  • Elle traduit l’action d’imposition du milieu sur l’activité cognitive du sujet, en le poussant à une réorganisation de ses connaissances, à une modification de sa manière de voir les choses, à la modification des conduites et des structures de l’individu.
  • Accommodation: milieu ---------> individu
  • C’est l’action réciproque de l’assimilation.
  • Équilibration: ces deux processus à la fois complémentaires et antagonistes – assimilation et accommodation – caractérisent l’intelligence entendue comme adaptation, c’est-à-dire comme recherche du meilleur équilibre possible entre les deux, c’est à dire aussi entre l’individu et son milieu de vie, ou entre l’individu et la situation problème à laquelle il se trouve confronté.
  • En résumé, cette approche :
    • considère davantage l’élève comme l’artisan de ses connaissances;
    • place ceux qui apprennent en activités de manipulations d’idées, de connaissances, de conceptions, de manières de faire, …
    • valorise les activités d’apprentissage, en mettant l’élève en position centrale.
    • privilégie la confrontation des apprenants à des situations-problèmes, parce que la déstabilisation des savoirs et des savoir-faire que l’apprenant a du mal à mobiliser efficacement pour résoudre le problème peut générer une dynamique de recherche de solution capable :
      - d’entrainer la restructuration de ce qu’il sait déjà,
      - de favoriser l’acquisition de savoirs et de savoir-faire nouveaux.
  • D’autre part, les connaissances se construisent sur la base de connaissances antérieures, les enseignants ont intérêt:
    • à se donner davantage d’outils permettant d’évaluer les pré-requis (savoirs et savoir-faire) dont disposent leurs élèves;
    • à tenir compte des représentations, des conceptions des élèves, car elles peuvent, soit servir de point d’appui, soit faire obstacle, à l’acquisition de connaissances nouvelles.
  • Le statut de l’erreur: les conceptions que les élèves se sont construites pour organiser le monde dans lequel ils vivent sont souvent différentes des conceptions scientifiques. Elles persistent fréquemment après l’apprentissage. Les conceptions constituent souvent des obstacles à l’apprentissage.
  • Le statut de l’erreur a évolué. Les erreurs commises par les apprenants ne sont ni des fautes condamnables, ni des manifestations pathologiques, mais font partie d’un processus normal d’apprentissage. L’erreur est source de réflexion et d’apprentissage. L’erreur passe ainsi d’un statut très fortement négatif à un statut plus positif dans lequel elle constitue un point d’appui pour la construction de nouvelles connaissances.
  • L’erreur n’est plus regardée comme une carence blâmable mais plutôt comme une insuffisance provisoire, constitutive d’un savoir encore en construction. En effet, lorsqu’on est rassuré psychologiquement, lorsqu’on n’a plus peur de l’erreur, on est plus disposé à faire l’effort d’apprendre à apprendre, de ce fait on multiplie les chances d’apprendre à mieux répondre ou à mieux écrire:
    on se découvre comme sujet compétent et on éprouve, par conséquent, un sentiment d’auto-efficacité, générateur d’une confiance en soi, stimulante et créatrice de motivation.
  • La conception constructiviste de l’apprentissage (dans son aspect central) se base sur la production d’un conflit cognitif par confrontation d’un apprenant à une situation problème, d’où un effet de déstabilisation susceptible de provoquer une réorganisation de connaissances ou l’acquisition de nouveaux savoirs et savoir-faire.
V/ Le socioconstructivisme
(Vygotski)
  • Lev Vygotski (1896-1934): psychologue russe, connu pour ses recherches en psychologie du développement et sa théorie historico-culturelle de psychisme. Hors de l’URSS, il a été découvert dans les années 1960. c’est un penseur qui a introduit la notion du développement intellectuel de l’enfant comme une fonction des groupes humains plutôt que comme un processus individuel.
  • Par rapport au constructivisme, cette approche introduit une dimension supplémentaire: celle des interactions et des échanges entre les élèves. Cette idée de base transparait dans bon nombre de titres d’ouvrages d’aujourd’hui: interagir et connaitre, on n’apprend pas tout seul, interagir pour apprendre, etc.
  • Cette théorie est basée sur le fait qu’un élève apprend mieux en groupe que tout seul.
    Vygotski parle du concept: conflit sociocognitif, lequel s’éloigne de la conception individualiste de Piaget.
  • L’interaction sociale est constructive dans la mesure où elle introduit une confrontation entre les conceptions divergentes.
  • Travail de l’enseignant:
    • Organiser les groupes;
    • Veiller au respect des contraintes;
    • Reformuler les consignes;
    • Ne pas apporter d’informations;
    • Mettre à disposition des ressources;
    • Choisir le mode de confrontation le plus efficace.